Les dimanches matin sont animés dans les villages d’Aveyron. Autour des églises, sur les places des mairies ou dans les stades, des hommes arrivent. Les uns traînent péniblement une caisse montée sur roulettes, d’autres portent sur l’épaule de lourds sacs en toile de jute d’où s’échappe le son du bois qui s’entrechoque. Pendant que l’on prépare le terrain, la buvette ouvre. On s’apprête à jouer aux quilles. Aux quilles, oui, mais aux quilles aveyronnaises, devenues un produit de pur terroir, au même titre que le tripou ou la coutellerie de Laguiole. Au profane, la partie qui se conclura avec les derniers rayons de soleil apparaît comme un joyeux tohu-bohu, une épreuve désordonnée.
Au début est la légende. Celle qui veut qu’un jour un vaillant joueur de quilles soit si las de ne jamais réussir à faire tomber les neuf cylindres verticaux qu’il en projeta une dans le tas afin d’horizontaliser les autres. Ainsi, conclut le mythe, est né le jeu de quilles aveyronnaises. Cette énième variante d’un jeu ancestral dont on ne trouve trace qu’en Aveyron serait donc née d’un geste de colère.
De la prétendue ire originelle, point de trace chez Christophe Recoules, 33 ans, instituteur remplaçant, qui porte la générosité sur ses traits et dans sa voix. Ce solide gaillard est un authentique sportif, partageant son corps musclé entre le rugby comme demi d’ouverture à Rodez et les quilles: «Ce sont deux disciplines qui se complètent bien, la saison des quilles débute lorsque celle du rugby est terminée.» Pour Christophe Recoules, aimer les quilles aveyronnaises, ça veut dire pratiquement être tombé dedans petit: «Par mes deux parents, j’ai des origines aveyronnaises. J’ai toujours vécu dans le département et j’ai bien peu bougé. La quille, ce n’est pas dans les gènes, mais presque. En tout cas, c’est totalement culturel et il est très difficile d’y intéresser quelqu’un qui n’a pas été bercé par ça dans sa plus petite enfance. C’est pourtant plus simple que la pelote basque, par exemple, mais même dans les départements limitrophes, ça a très peu débordé. Il y a des clubs de quilles à Paris, Montpellier ou Toulouse, qui sont nés avec l’exode des Aveyronnais au début du siècle (….)
Pendant une compétition (huit parties de neuf jeux), un concurrent lance 72 fois la boule de 6 kilos et 72 fois la quille de 2 kilos. Gaucher du pied pour le rugby, droitier à la main aux quilles, Christophe explique pourtant que la force pure ne joue pas un rôle primordial: «Le principal est dans la précision du geste, dans sa préparation lors de la course d’élan et dans l’effet que l’on donne. Dès l’instant où on lâche la boule, on sait si le coup va être bon ou raté. Le plus difficile à acquérir, c’est la coordination entre le bras en balancier qui va permettre de lancer sans effort, le regard sur la quille à jeter et la course, où il faut arriver avec le pied d’appui opposé au bras.»
Depuis 1970, une vingtaine d’écoles primaires de l’Aveyron dispensent des cours de quilles et organisent des compétitions. Plus récemment, les femmes ont commencé à se faire une place au soleil des quillodromes. Pour Christophe, c’est le gage que l’identité culturelle n’est pas près de s’éteindre.
Et cette identité se cultive dimanche après dimanche: «Pratiquement tout le village est là quand il y a une épreuve, et ce côté festif est essentiel à préserver. Le jour où il n’y aura plus cela, ça ne vaudra plus le coup de jouer.» Il est vrai que l’appât du gain est un dérisoire stimulant: «Le vainqueur d’un tournoi peut gagner 100 francs, mais avec les 40 francs d’inscription et l’apéritif qu’il faut offrir pour arroser la victoire, on en est toujours de sa poche.» Libération 29 juillet 1995
Le village de Magrin, depuis plus de 50 ans, a vu naître et grandir un grand nombre de champions dans toutes les catégories (Excellence, Honneur et Promotion), depuis les très jeunes jusqu’aux seniors, parmi les garçons et les filles et le jeu de quilles de huit y a été érigé en véritable religion. Le Président du Comité National, Jacques Regourd y vit et Magrin a même été cité dans le reportage qui a été fait sur ce sport.
http://videos.tf1.fr/jt-13h/la-quille-de-8-jeu-traditionnel-de-l-aveyron-4836994.html
Au mois d’octobre 2012, l’assemblée générale du Comité National des quilles de huit, s’est tenue à la salle des fêtes de Magrin en présence de nombreuses sommités sportives et politiques (maire et conseiller général). La réunion au cours de laquelle Jacques Regourd a annoncé qu’il cessait ses fonctions de Président a duré jusqu’à minuit, après quoi, les bénévoles du club de Magrin, ont servi une soupe au fromage. C’est à ce moment là que Gérard E, l’arbitre du club, dont le verbe légendaire ponctue nombre d’évènements privés ou publics, a lancé son « j’accuse » pour rappeler que « les quilles », avant d’être un sport était un jeu avec des règles moins strictes et surtout l’expression d’une culture locale bien enracinée dans le terroir aveyronnais,
Coup de pied aux discours officiels auto-satisfaits et élogieux ou petite larme nostalgique ???
En tout cas, un morceau d’anthologie « magrinole » qui ne manque pas de couleur et de verve fleurie et imagée!
Merci Gérard, d’avoir accepté de partager cet instant savoureux!
Mesdames, mesdemoiselles, messieurs….
20 ans pour certains…24 ans pour d’autres…
…la fin d’un cycle….le début d’une ménopause… !
Loin des discours flatteurs et dithyrambiques de courtisans cireurs de pataugas, et tel le furoncle mûrissant au fessier du cycliste…j’explose !! J’explose et je m’élève, ce soir et à l’ascension, contre certaines décisions du Comité National ayant fortement entamé les us et coutumes séculaires de notre Jeu de Quilles de huit … !
Et je dis à la façon d’Emile Zola (de son vrai nom Emile Gorgon Zola Auffray) : J’ACCUSE… !
J’accuse le Comité National d’avoir été à l’origine de la disparition des grands équipementiers sportifs qu’étaient Adolphe Laffont et Janot Lou Paysan… ! On a changé la véritable et confortable popeline des Pyrénées contre un vulgaire bas nylon ADIDAS très abrasif pour l’entrejambe… !
J’accuse d’aveuglement les auteurs de l’interdiction de l’anisette, sur et autour des terrains de quilles, qui ont ainsi rompu une collaboration de plusieurs décennies avec la maison RICARD ! Une société bien française, qui bourrait les joueurs et … les caisses ; et qui n’a pas tardé à réagir en supprimant casquettes et bobs Ricard ! Des symboles du joueur de quilles qui permettaient de le différencier des joueurs de pétanque qui portaient exactement …la même chose !? Le nouveau Comité aura, ainsi, à faire face à la montée grandissante des bonnets à la Bob Marley et des casquettes de rappeurs façon banlieue de Canet de Salars … !Bon courage !
J’accuse le Comité National d’avoir sciemment favorisé le déclin de la Salers ! Pas la vache…la gentiane !! Une boisson légendaire rendue célèbre, dans les années 70, par un quarteron de bougnats parisiens, champions de quilles aux performances suspectes aux yeux de certains ! On pensait dopage ! Mais le fait qu’on ait trouvé des traces de Salers dans les urines d’Armstrong ne constitue pas une preuve car on a trouvé exactement l’inverse chez les parisiens… !! Aujourd’hui, une pâle copie au nom évoquant la race Salers tente de s’imposer au comptoir de nos buvettes : Red Bull … ! Nous demandons au nouveau Comité National d’envoyer paître ce Taureau rouge aux côtés de la Vache qui rit en prenant soin de les stériliser pour éviter toute descendance … !
J’accuse également le comité national et son médecin traitant d’avoir provoqué la disparition et l’extinction totale de la Gitane maïs. Une véritable atteinte à l’image du joueur. Le béret et la Gitane maïs étant la caricature parfaite du quilleur ! Au passage, rendons hommage au dessinateur Jean Ferrieu qui immortalisa tant de joueurs et tant de clopes… ! La Gitane maïs : la cigarette du sportif par excellence (bon…honneur et promotion aussi… !! ). On l’allumait au rabat, on mégotait encore à 20m ! La seule cigarette qui consumait plus de briquets que de tabac… !
J’accuse, encore et enfin, le responsable des arbitres du Comité National d’avoir cautionné une création vestimentaire remarquable : la tenue officielle des arbitres. Un must! En haut, une chemisette de style italien… qui fait que chaque fois que je rentre chez moi habillé, on me demande si je fais toujours des coupes au rasoir et des shampoings …. ?? J’ai du mal à m’y faire … !! En bas, un pantalon de forme improbable, agrémenté de plusieurs poches aux utilités multiples dont deux sont remarquables : l’une doit servir à ranger « des avantages en coupures destinés à favoriser le bon décompte des quilles abattues … ! » L’autre sert, et là, l’idée est géniale vu l’âge assez avancé des arbitres, l’autre sert à ranger… le dentier !?
Je conclus en souhaitant bon vent aux nouveaux dirigeants. Mais qu’ils comprennent qu’il y aura toujours un gardien du Temple pour perpétuer la tradition, que nous garderons notre libre arbitre et que nous les aurons à l’œil ….gratuitement !!
Bonsoir